RÉCAP 2024

Bonjour/Bonsoir,
Dans cet article, j’ai voulu faire un récapitulatif de mon année 2024, comme dirait Papa Rocho : « c’est une année charnière ». Pour ceux qui ne le savent pas, j’ai fait un saut en parachute sans parachute. En fait, j’en ai même fait plusieurs. Mais bon, I’m not Carrie Bradshaw, donc on va parler de ceux qui ont eu un impact significatif sur ma vie pro.

On va commencer par planter le décor de 2024 afin que vous puissiez comprendre le pourquoi du comment de ce que je fous dans ma vie :

  1. Implosion

  2. Une prise de conscience

  3. Une mission de sauvetage

  4. Un plan d’attaque

  5. Sortie et feux d’artifice

MA CDI VIE

Avant d’être illustratrice, je suis avant tout directrice artistique. Un bon gros titre qui veut tout et rien dire en 2024 (mais bon, ça devait flatter plein d’egos masculins dans les années 90). J’ai donc commencé par être assistante DA en alternance dans une agence, puis j’ai été embauchée en CDI (erreur numéro uno).

Il faut savoir que je fais partie de la génération qui n’a pas eu de fin d’études, car on était tous sagement enfermés dans nos studios à taper sur des casseroles à 20 h. Après tout le merdier de ce cher Cov, des grands esprits m’ont dit : « Pauline, fais pas ta star, prends ce qu’on te propose, car ça va pas être la joie niveau économie et marché du travail ». J’ai appliqué ce qu’on m’a dit et j’ai donc continué dans l’agence de mon alternance.

J’ai réussi à gratter des projets, à faire comprendre qu’on pouvait me faire confiance, à fermer ma grande gouaille quand mon travail était approprié à d’autres personnes (des zhommes évidemment, hein). J’ai appris plein de choses sur le tas, pas par envie mais par obligation, car il fallait bien qu’un truc sorte et que personne n’avait envie de mettre les mains dans le cambouis. Je me suis donc retrouvée sur des énormes projets en étant junior.

Alors, vous me direz : « Bah Pauline, trop bien, de quoi tu te plains ? T’as un taf, on te fait confiance, tu bosses sur des big projets, etc. », bah oui, mais non. Être sénior et avoir de l’expérience ne se résume pas à savoir effectuer une tâche. C’est aussi savoir composer avec le stress et l’organisation. Une fois que tout est géré, tu as le temps de mieux développer ton projet, car ton cerveau n’est pas obligé de donner 150 % de ses capacités pour produire.

Vous savez ce qui se passe quand une voiture est en surrégime ? Bah le moteur casse. Eh bien, c’est ce qui s’est passé. J’ai cassé. J’ai donc, en janvier, pété une durite. C’est arrivé comme ça, sans prévenir. J’avais tellement l’habitude d’être en surrégime que je ne l’ai pas vu venir. Malheureusement, le taf n’est qu’un paramètre parmi d’autres. Un management pas ouf (pour pas dire autre chose), du favoritisme, un manque de considération, de respect... Tout ça vient s’ajouter à la longue liste des raisons qui te mènent au pétage de câble. (note à moi même : y a toujours pire ailleurs alors ça sert à rien de minimiser ce que tu ressens juste parce que t’as pas envie de passer pour une chouineuse, ignorer le problème c’est pas le rêgler)

Après cette sortie de route (très métaphore automobile aujourd’hui, hein), je suis retournée bosser. J’ai arrêté de me battre, je faisais exactement ce qu’on me demandait, ni plus ni moins, ce qui est assez dur dans la création, car t’as toujours envie de dépasser le cadre et faire plus.

En Avril, les directeurs nous annoncent qu’on aura l’obligation de poser nos congés durant la période des JO. Traduction : poser des jours de congés durant une période que je n’ai ni choisie ni envie de prendre (ptdr, qui a envie de partir les deux premières semaines d’août ??). Ce fut donc le coup de grâce. Bosser toute l’année pour même pas choisir quand je peux partir en vacances ?Vacances qui étaient, par ailleurs, prévues, billets pris et tout… même ça, on me l’enlève. Et là, BOOM, prise de conscience. À quoi bon se péter le crâne pour des gens qui se fichent de ta santé, pour des gens qui ne font même pas la différence entre une bonne ou une mauvaise DA, pour des marques turbo problématiques tout ça entassé dans un openspace à te forcer à boire dans des gourdes comme si on était des gosses de 5 ans. BREF, À QUOI BON ? On est quand même peu de temps sur Terre, donc quitte à être stressée constamment, autant que ce soit du bon stress, celui de mon projet. J’ai donc posé ma grosse dem’. Je me suis assise sur 2100 € par mois (ptdr, les mecs m’avaient augmentée deux mois avant, après six ans à avoir un salaire beaucoup plus bas que mes homologues masculins… bref, passons, c’est une autre histoire, ça), ce qui signifie une situation financière stable. J’adore la stabilité. Je me suis aussi assise sur tout ce qui est mutuelle, cotisations chômage, retraite… Bref, j’ai lâché la rampe du salariat. J’ai également perdu beaucoup de kilos, sans doute le poids du stress qui était en train de me faire couler. J’ai arrêté de perdre mes cheveux et de manger mes émotions.

Étant donné que j’avais un statut cadre, j’ai eu trois mois de préavis. Cette période m’a permis de mettre en place mon plan d’attaque. Objectif : avoir 5000 € de côté. Ce n’est pas énorme, mais ça évite de couler trois mois plus tard. Je suis donc passée en mode Picsou : chaque dépense inutile a été supprimée, mon copain est venu s’installer chez moi (division des charges de l’appart’), j’ai rendu mon atelier à Hôtel de Ville (suppression d’un loyer en plus), et j’ai supprimé tous les abonnements inutiles et les petits cafés à 5 € dehors. (Sérieusement, à quel moment a-t-on normalisé de payer aussi cher un café avec du foutu lait végétal composé à 90 % d’eau ?). J’ai aussi vendu plein d’affaires sur Vinted. Bref, j’ai fait le tri de ma vie pour accueillir un nouveau départ, comme disent les gourous/tarés du développement personnel. J’ai eu la grande chance de pouvoir m’installer dans un nouvel atelier gratuitement, donc mon studio tout petit n’a pas été encombré par mon bazar (atelier).

Mon nouveau burrrrrr’

Mai
Le temps filocheeeeee. J’annonce sur Instagram que je quitte mon CDI. Au même moment, je reçois deux propositions de taf. Je me dis : « Bénéf’ ! Ça va me permettre de monter ma cagnotte. » Je me rends compte que j’aime bien la gestion de projet, parler avec les clients en direct… Chose que je détestais faire à l’agence, car les gens s’en foutent de savoir que c’est toi et ta collègue qui avez pondu le concept, développé, et changé 800 fois les mots et la DA. Ce qu’ils voient, c’est juste le mec qui crie le plus fort et qui présente bien. (En l’occurrence, "présenter bien" signifie faire des grands gestes avec ses mains et balancer des tunnels en réunion.) La différence, cette fois-ci, c’est qu’ils m’ont choisie, MOI : mon travail, ce que je suis et mon expertise. Ils n’ont pas pris le premier clampin disponible dans l’open space. Tout ça me redonne foi en mon savoir-faire, mes compétences, et l’idée qu’il y a peut-être un monde où je peux être indépendante sans devoir me coltiner un cadre étriqué.

Juin
Le retour de l’été, des couleurs et du bonheur. Rien à dire : je fais l’écureuil et j’épargne dès que je peux.

Juillet
C’est le bigggg moment ! J’avais prévu que mon dernier jour de taf tombe le jour de l’ouverture des JO, pour que tout le monde fasse la fête à mon départ (et surtout pour ne jamais oublier cette date). Je ne réalise toujours pas ce que je viens de faire. Heureusement que j’ai mon projet de mai qui continue : à ce moment-là, c’était un peu comme un doudou. Il me permettait de ne pas tout lâcher. J’ai profité des JO, je me suis baladée, et j’ai enfin eu le temps de m’ennuyer. Purée, j’avais oublié l’importance de s’ennuyer. Quel bonheur de ne pas savoir quoi faire ! Personnellement, c’est dans ces moments-là que mon cerveau fait des associations intéressantes pour l’illustration.

Août
En train de bouffer toutes les salades grecques de Corfou et de m’enduire d’huile d’olive.

Septembre
J’ai commencé mes démarches administratives. Les portes de l’enfer se sont ouvertes à moi. Je me suis fait recaler de l’accès au chomchom’, car les démissions ne permettent pas d’y accéder. Il faut faire une rupture conventionnelle ou une démission-reconversion. Je ne pouvais faire ni l’un ni l’autre. (Ravie d’avoir cotisé plus de six ans pour me faire recaler parce qu’illustratrice, c’est un peu comme DA, donc ça ne marche pas. J’aurais dû faire comme tous mes voisins du 10e arrondissement : partir au fin fond du Béarn et devenir éleveuse de moutons. Bref.) J’ai ensuite découvert le merdier du statut d’« auto-entrepreneur » vis-à-vis de la CAF, des impôts, et de France Travail. J’ai aussi eu droit à une formation « Comment monter son entreprise », qui, ma foi, m’a fait relativiser sur mon niveau d’information concernant la gestion d’une auto-entreprise. (Conseil, si vous avez besoin de rien et perdre une journée de votre vie, demandez cette formation. Honnêtement Chat gpt a été d’un plus grand soutien que cette formatrice qui devait sans doute être aussi en formation).

PREMIER MOIS DE MA FREELANCE VIE

Tout s’enchaîne assez vite : j’ai des propositions de tafs trop coolos qui tombent, des projets qui se terminent, d’autres qui restent à l’état de devis. Les jours où je n’ai rien à faire, je prends le temps de concevoir ma collection pour mon shop, d’expérimenter des trucs… Parfois, je ne fais rien. Et je n’ai même pas honte, car brasser de l’air en faisant semblant de bosser, j’ai vu des gens le faire pendant six ans : ça fait juste plaisir au manager. Personnellement, ne rien faire me permet de mettre mon cerveau en jachère, de lui laisser le temps de se régénérer pour pouvoir performer quand il faudra tout donner. Je trouve peu à peu mon rythme et règle la machine de mon temps de travail.

Digression n°67 : J’ai envie de dire à chaque bout de phrase que j’ai de la chance de pouvoir faire ça. Mais en vrai ? C’est 50 % de chance et 50 % de taf. Si je peux me permettre de faire ça aujourd’hui, c’est parce que, bon, on va pas se mytho : je suis quand même née dans la bonne famille. J’ai un capital social qui m’a vachement avantagée. Ne pas payer ses études, ça aide. Avoir un soutien psychologique et des gens qui t’aiment, c’est quand même vachement mieux. Mais j’ai aussi bossé. Je suis grave fière de me dire que bosser le soir, le week-end, le matin, en plus d’un 39 heures, m’a permis de construire mon monde. Que me faire tellement chier pendant mes études et dessiner à côté, écouter des podcasts, lire, suivre, me nourrir de trucs random m’a servi à en arriver là où je suis. On m’a plusieurs fois demandé sur les marchés ou en mp : « Comment t’as réussi à être illustratrice ? ». Déjà, je n’ai pas "réussi", parce que réussir signifie arriver au dernier palier. Et moi, j’arrive même pas à monter deux étages sans être essoufflée, donc la réussite, c’est pas pour tout de suite. Puis je ne suis pas sûre qu’il y ait réellement de "réussite" dans mon milieu. Je vois plus ça comme une quête : tu te fais parachuter sur une île et tu dois survivre le plus longtemps possible. Parfois, la vie est cool et tu tombes sur des fruits. Il y a même des fois où tu trouves du feu, et là, c’est la folie. Puis, coup de vent : plus de feu. Alors tu repars en quête dans la jungle de l’illustration. Je sais pas où je vais avec cette métaphore, mais je pense que vous avez capté la DA.

Octobre-novembre-décembre
Un mix de préparation de marchés et de projets clients. C’était la maxi course, mais j’ai pu cocher des cases de ma to-do list d’illustratrice. APRÈS CINQ ANS, j’ai enfin été prise aux Puces de l’Illustration, un marché trop cool. Cinq ans à me prendre des gros râteaux, à péter le seum parce que tu sais pas pourquoi ça marche pas, à me dire « Ouin ouin, pourquoi pas moi ? »… Je vous jure, le mot « persévérance » n’a jamais été aussi bien illustré qu’à ce moment-là.

J’ai donc décidé de me mettre la maxi pression pour que tout soit parfait (merci Charline pour le soutien psy, aha). J’ai décidé de faire des bougies à la dernière minute (le truc qui n’est pas DU TOUT censé se faire à la dernière minute, hein, faites pas comme moi), des risos, des stickers… Je suis passée en mode TERMINILLUSTRATOR. J’ai lancé ma boutique dans la foulée, avec un shooting bricolé avec les moyens du bord. J’ai fixé une date au doigt mouillé, puis ça a cartonné (merciiii).

Un shooting à base de nappe froissée, toute ma vaisselle et 2h de soleil hivernal (les seules du mois de novembre ihi)

J’ai enchaîné les marchés, avec des maxis réussites et, of course, sa dose d’échecs (j’ai écrit un article sur les marchés, allez voir ça). Puis j’ai échoué sur le canap’ de mes parents pour les fêtes de fin d’année. Avant d’écrire tout ça, j’avais la sensation de n’avoir rien foutu de l’année. C’est fou comme mon cerveau est fort pour effacer ma bande passante et se souvenir de trucs inutiles (genre la fois où j’ai vu un œuf de lézard dans ma cour de maternelle… Que faire de cette info ? Je ne sais pas).

J’AI CARBURÉ. Voilà ce que je retiens de cette année.

Au début, je voulais faire un truc en mode récapitulatif de mes objectifs fixés en janvier 2024. Mais en fait, il n’y en a même pas trois de remplis. Et je crois que j’ai fait encore mieux que cette liste. Alors je suis déjà assez contente de moi. Ma vie n’est pas une liste de courses, je crois bien.

En 2025, je me souhaite tout de même quelques trucs :

  • Ne pas avoir un dos en miettes.

  • Avoir une vraie chaise de bureau (si ma mère lit ça, elle va me dire que ça fait trois ans que je la bassine avec ça).

  • M’acheter un écran d’ordi pour ne plus être en mode crevette sur mon laptop.

  • Bonus : un clavier stylé.

  • J’allais écrire faire du sport pour me muscler le dos… On verra ça en 2026.

  • Ne pas avoir à démarcher
    Un objectif de star, mais purée, c’est vraiment mon but ultime. Quand les gens viennent te voir pour TOI, chaque notification de mail, c’est comme un 25 décembre (ou pour les gens bizarres qui ouvrent leurs cadeaux le soir : un 24 décembre)

  • Continuer sur cette lancée
    J’ai des clients maxi cools : ils paient en temps et en heure, n’hésitent pas à dire quand ça leur plaît (ou pas), écoutent mes conseils et savent ce qu’ils veulent. Et — j’allais oublier — ILS CONNAISSENT LA VALEUR DE MON TRAVAIL. Pas des gens qui me proposent 100 € et trois canettes de 8.6 pour une affiche, quoi.

  • L’entourage
    Je suis ultra bien entourée. Bon, ça m’a demandé un certain travail de tri dans mes relations, mais maintenant, QUE DES NUMÉROS UNO dans ma team. Alors merciii. Je sais que vous savez que je parle de vous, de toi, de nous (je m’arrête là, on dirait une mauvaise chanson de Patrick Bruel).

Grosso modo : le classique. Santé, travail, bonheur, famille.
Voilà le récap de cette folle année 2024.

P.S. : J’ai un peu une liste de clients de rêve ou de projets de rêve, mais j’ai peur que ça fasse comme les vœux. Si on les partage, ils ne se réalisent pas.

P.S. bis : En vrai, il y a plein de sujets que je n’ai pas trop abordés : mes différents canaux de rémunération, comment se déroulent mes projets, comment j’ai fait pour me faire démarcher, blablabla… Je pense qu’il vaut mieux garder ça encore au chaud, attendre d’avoir plus de choses à dire et des retours pour vous faire de vrais articles.

Voila voilaaaaa, cette fois ci c’etait un sujet un peu plus personnel, je crois que je l’ai écrit surtout pour garder une trace de cette année, encore merci pour vos commandes, les petits mots doux, le bouche à oreille et les partages qui permettent à mon univers de s’étendre dans des contrées toujours plus lointaines.

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